L’épopée brésilienne de Vittorio Freschi et Amalia Callegari

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Gli emmigranti – Angiolo Tommasi – 1896

Vittorio et Amalia sont mes arrières-arrières-grands-parents. Plusieurs de leurs enfants ont quitté l’Italie pour faire leur vie en France et aux Etats-Unis dans la première moitié du XXe siècle, mais ce sont eux qui, les premiers, ont ouvert la voie de l’émigration à la famille en tentant de s’établir au Brésil à la fin du XIXe siècle.

Nervesa della Battaglia est une commune italienne de la région de la Vénétie, dans la province de Trévise. Située à une quarantaine de kilomètres de Venise et moins d’une vingtaine de Trévise, elle est bordée par le fleuve Piave et se niche au pied du Montello, une colline ne dépassant pas les 371 m d’altitude.

« Della Battaglia » ne sera ajouté à Nervesa qu’à la période fasciste, en référence à la bataille du Solstice durant la première guerre mondiale qui a fait de nombreux morts à Nervesa et ses alentours, et détruit presque entièrement la petite ville.

Nervesa pendant la première guerre mondiale

C’est ici que Vittorio Umberto Freschi voit le jour en 1873, et plus particulièrement à Borgo di Piave, un quartier au bord du fleuve.

Son père, Giulio, est garde-forestier et sa mère, Maria Orzali, est femme au foyer. Tous deux ont déjà plus de 40 ans à la naissance de Vittorio, on peut donc supposer qu’il est leur dernier enfant. Une dizaine d’années auparavant étaient déjà nés Michele, Catterina, Egidio et Carolina. Il est plus que probable qu’entre temps d’autres enfants sont venus compléter la fratrie, mais en l’absence d’archives, cela restera une hypothèse.

Extrait de l’acte de naissance de Vittorio – 1873 – Nervesa – Italia, Treviso, Stato Civile (Tribunale), 1871-1941 – Familysearch

Contrairement à Vittorio, les 3 autres enfants ne sont pas nés à Nervesa mais à Motta di Livenza pour les deux premiers et Volpago pour la dernière. Mais il ne semble pas que les Freschi soient originaires de l’une de ces communes, dans lesquelles ils n’ont été apparemment que de passage, sûrement au gré des emplois de Giulio. Peut-être viennent-ils de Codognè, à 22 kilomètres, village natal de nombre de Freschi et quelques Orzali ? 

A 21 ans, Vittorio épouse Amalia Callegari. La famille de la jeune femme de 22 ans vit à Bavaria, hameau de Nervesa, depuis plusieurs générations. 

Ses parents, Giovanni et Francesca (une Callegari elle aussi) sont agriculteurs, tout comme leurs ancêtres avant eux. En plus d’Amalia, les Callegari ont trois autres enfants : Luigi, Ferdinando et Giulia.

Extrait de l’acte de naissance d’Amalia – 1872 – Nervesa – Italia, Treviso, Stato Civile (Tribunale), 1871-1941 – Familysearch

Lorsque les deux jeunes gens convolent le 27 juin 1894, ce n’est pas véritablement dans l’optique de fonder une famille, mais plutôt de légitimer celle qu’ils ont déjà. Un an plus tôt, Vittorio s’était rendu à la mairie de son village pour déclarer la naissance de sa fille Maria, née de lui… et de mère inconnue. Cela n’a en fait rien d’étonnant. Depuis l’unification de l’Italie en 1861, seuls les mariages civils sont reconnus par l’état italien et les mariages religieux n’ont plus aucune valeur légale. Pourtant, par ignorance des nouvelles lois ou respect des traditions ancestrales, de très nombreux jeunes couples continuent à s’unir devant Dieu avant de régulariser leur situation devant le maire quelques mois ou années plus tard, et souvent après la naissance de leurs premiers enfants. 

Extrait de l’acte de mariage de Vittorio et Amalia – 1894 – Mairie de Nervesa della Battaglia

« … que de leur union naturelle est née une fille née de mère inconnue et déclarée à cet officier le 18 août 1893 au nom de Freschi Maria… »

Et si le couple s’est enfin décidé à régulariser sa situation, ce n’est pas uniquement dans le souci de se conformer à la loi italienne, mais aussi et surtout parce qu’ils prévoient un long voyage. Désormais, Vittorio a officiellement une famille à nourrir, ce qui n’est vraiment pas simple en cette fin de ce XIXe siècle.

A Nervesa, comme dans toute la Vénétie, le travail et la nourriture ont souvent manqué. Et en 1894, la déforestation massive de la forêt du Montello n’a pas arrangé les choses. Après plusieurs siècles de protection pour fournir durablement du bois à Venise, une loi est promulguée en 1892 accordant des terres aux familles les plus pauvres vivant autour du Montello, pour qu’ils y développent l’agriculture. Cette décision censée les aider a finalement aggravé leur situation : les sols très acides et calcaires de la colline rendent toute culture impossible et la disparition de la forêt a privé la population locale de son commerce du bois avec Venise. Les habitants de la région sont réduits à un tel état de pauvreté qu’ils sont même surnommés « Bisnenti » : les deux fois rien.

Pour Vittorio et sa toute jeune famille, s’imaginer un avenir heureux dans la région qui les a vu naître semble donc impossible. 

A plus de 9000 kilomètres de là, au Brésil, l’économie est en plein essor et les plantations de café, notamment dans les régions de São Paulo et de Minas Gerais, se développent à grande vitesse. Mais depuis l’abolition de la traite négrière en 1850 et de l’esclavage en 1888, la main-d’œuvre se fait rare dans le pays. Le gouvernement décide alors de favoriser l’émigration européenne, et surtout italienne, afin de remplacer les esclaves. A l’aide de rabatteurs, souvent italiens eux-mêmes, le Brésil vend le rêve d’une vie plus douce et plus riche de l’autre coté de l’atlantique, et va même jusqu’à financer le billet de bateau des candidats au départ et à leurs familles, trop pauvres pour se le payer eux-mêmes. Entre 1870 et 1920, ce sont plus d’un million d’italiens, notamment du nord et de la Vénétie, qui immigrent au Brésil.

Affiche de propagande brésilienne pour inciter les italiens à émigrer.

« En Amérique… Des terres au Brésil pour les italiens. Bateaux au départ toutes les semaines du port de Genova. Venez construire vos rêves avec votre famille.. Un pays d’opportunités. Climat tropical, vivres en abondance. Richesses minérales. Au Brésil vous pouvez avoir votre château.. Des terres et des outils pour tous. »

Vittorio, comme beaucoup, se laisse tenter par l’aventure et par l’espoir de faire fortune. 

Il faut dire que rien ne le retient vraiment à Nervesa : Ses parents sont morts depuis quelques années déjà, et son frère et sa sœur, Egidio et Carolina, sont eux aussi du voyage. Seul leur frère aîné Michele reste en Italie. Catterina, quant à elle, est décédée en 1888.

Alors, dès la fin de la célébration du mariage, toute la famille se met en marche : Vittorio, Amalia, leur petite Maria, Egidio et son épouse Amabile Zaccharia, Carolina, son mari Giovanni Baldasso et leurs deux fils, Vittorio et Umberto. Tous lancent un dernier regard à leur village, font leurs adieux aux parents d’Amalia, et se lancent sur la route de l’inconnu. 

La première étape de leur périple est le port de Genova, d’où partira leur bateau. Aujourd’hui, il ne faut que 4h30 pour rallier Genova depuis Nervesa par l’autoroute. Mais à la fin du XIXe siècle, cela est bien plus compliqué, et les choix ne sont pas nombreux. Il y a d’abord le chemin de fer. Depuis Nervesa, il faut se rendre à la gare de Susegana, à 9 kilomètres. De là, prendre le train jusqu’à Treviso, changer à Vicenza, encore une fois à Milano, pour enfin arriver à Genova. Cela prend plusieurs jours, mais c’est le plus rapide. Il y a aussi les convois de diligences, très bien organisés (souvent par les compagnies maritimes elles-mêmes), pour accompagner les voyageurs jusqu’à leur port, avec leurs meubles et leurs bagages. Mais ils sont plus lents que le train. Dans tous les cas, cela coûte de l’argent et doit être minutieusement préparé. Si l’on ne sait quel mode de transport la famille a choisi, cette première partie de leur périple doit déjà être un moment extraordinaire pour ceux qui n’ont jamais quitté le nord de l’Italie, voire même leur village.

Moins d’une semaine après la noce, les Freschi se retrouvent sur le port de Genova. Maintenant, il faut attendre. Dans une des auberges sordides qui s’enrichissent sur le dos des pauvres émigrants, ou sur les bancs du port pour ceux qui n’ont même plus de quoi se payer une chambre. 

Il faut aussi faire attention. A ne pas se faire voler dans ces auberges mal famées, à ne pas se faire escroquer par des agents d’émigration peu scrupuleux, à ne pas manquer le bateau.

Emigranti – Raffaello Gambogi – 1894

Et enfin, le 6 juillet, c’est le grand départ. La famille embarque sur le navire Il Caffaro, et le voyage ne sera pas de tout repos.

Article de journal datant du 24 juin 1894, une semaine avant le départ du Caffaro, qui prendra à son bord la famille Freschi et près de 1200 autres émigrants. Il Lavoro – Hemeroteca Digital Brasileira

Les plus pauvres voyagent dans la soute, aménagée en dortoir. Il n’y pas de hublot, pas de lumière. Les conditions d’hygiène sont déplorables, les installations sanitaires rudimentaires et faire sa toilette plus que compliqué. Les punaises et les poux infestent les matelas et les passagers. Les maladies telles que le choléra, la variole, la rougeole, affaiblissent les plus forts et déciment les plus faibles. Nombre d’entre eux n’atteindront jamais le Brésil et seront rejetés à la mer après une brève cérémonie. Bien sûr, il y a un service sanitaire, les dortoirs sont désinfectés chaque matin, obligeant leurs occupants à sortir sur le pont très tôt, dans le froid, le temps du nettoyage. Il y a aussi un médecin de bord, mais il est rapidement dépassé lors des épidémies, malheureusement fréquentes. 

Mais les Freschi font partie des chanceux : Tous arriveront sains et saufs au Brésil. Le 1e août, après 25 jours de traversée, la famille pose enfin le pied sur la terre ferme, et sont débarqués sur le port de Santos. Sûrement soulagés d’être arrivés, mais aussi fascinés par la découverte de ce nouveau pays dont ils ne connaissent rien, ils ne sont pourtant pas au bout de leurs peines. 

Déjà, il leur faut réussir les tests psychologiques et physiques que sont amenés à passer tous les passagers dès leur arrivée au port. Pour ceux qui échouent, c’est la désillusion. Ils devront reprendre un bateau et retourner dans leur pays. Là encore, Vittorio et sa famille semblent avoir la chance d’être tous autorisés à s’établir au Brésil. Mais avant, il leur faut se reposer un peu et, pour les hommes, trouver du travail. Comme tous les immigrants, ils sont amenés, en train, jusqu’à l’Hospedaria de Imigrantes, à Bràs, un quartier de Sao Paulo à près de 75 kilomètres du port. Ils pourront y rester 8 jours gratuitement. Ils y seront plus ou moins bien nourris, logés, blanchis et soignés si besoin. 

Emigrants à l’Hospedaria de Sào Paulo en 1890 – Memorial do Imigrante

Le registre des emigrants de l’hospedaria de Sào Paulo dans lequel figurent les frères Freschi. Arquivo Público do estado de São Paulo – Livros de Registro da Hospedaria de Imigrantes

C’est surtout là qu’ils vont attendre qu’un fazendeiro, un propriétaire d’une ferme de café, vienne prendre contact avec eux pour les embaucher et les emmener. Les fazendeiros privilégient les familles aux célibataires, jugés plus susceptibles de causer des ennuis. Mais ils rechignent tout de même à employer des pères ayant des enfants en bas-âge, trop jeunes pour travailler et donc inutiles, ce qui est le cas de nos Freschi. Maria n’a que 10 mois et demi, Umberto 2 ans, et Vittorio 5 ans. On ne sait pas combien de temps la famille est restée à l’auberge, si tous l’ont quitté en même temps, ni s’ils ont tous été embauché dans la même fazenda.

Le dortoir de l’Hospedaria, dans lequel a dormi la famille. Memorial do Imigrante

En ce qui concerne Egidio et Amabile, leur séjour à l’Hospedaria est la seule trace de leur passage au Brésil. Ils ne s’y sont illustrés en rien, n’apparaissent sur aucun registre. Combien de temps sont-ils restés ? Ont-ils échoué aux tests d’entrée ? Nous ne le savons pas, mais tous les deux décèderont plusieurs années plus tard, à Nervesa. Et ils ne semblent n’avoir jamais eu d’enfant, ni en Italie, ni au Brésil.

Vittorio et son beau-frère Giovanni, en revanche, ont fini par trouver un patron au même endroit, à Jacutinga. 

C’est une petite ville du sud de l’Etat de Minas Gerais, dans la microrégion de Poços Caldas et toute proche de la frontière avec l’Etat de Sào Paulo, qui n’est pas encore desservie par le chemin de fer. Celui-ci n’arrivera que 3 ans plus tard. Après quelques jours ou semaines de repos forcé à Sào Paulo, il ne leur reste encore une journée de train jusqu’à Espirito Santo, puis plus de 5h de marche pour atteindre Jacutinga et enfin en finir avec ce très long voyage et commencer leur nouvelle vie.

Jacutinga à la fin du XIXe siècle. Au fond, la silhouette de l’église Sant Antonio, que fréquenteront les Freschi. Câmara municipal de Jacutinga MG

Malheureusement, tout ne se passera pas comme ils l’imaginaient. L’eldorado qu’on leur avait promis n’existe pas. La réalité, c’est que les fazendeiros ont du mal à en finir avec l’esclavage, et ont plutôt tendance à oublier que les hommes qu’ils emploient maintenant sont libres. Lorsqu’ils se rendent dans les hospedarias pour y chercher de la main d’oeuvre, ils savent se montrer convaincants. Avec la complicité des interprètes, ils trompent les familles en promettant de bons traitements et de bons salaires afin de les décider à conclure des contrats de travail aux termes souvent obscurs et de les suivre dans des fermes parfois isolées. 

Comme le dit un immigrant de l’époque, « De ces contrats dépend tout l’avenir d’une famille et il est assez douloureux de dire, personne ne regarde le colon, personne ne lui conseille d’accepter tel ou tel contrat, de choisir tel ou tel patron ».

Mais, dès que les pauvres immigrants s’installent sur le domaine de leur nouveau patron, rien de ce qui a été promis ne les attend, bien au contraire. Là, ils travaillent du lever au coucher du soleil, avec juste une petite pause pour se restaurer. La cloche sonne le matin pour réveiller tout le monde et commencer la journée, et le soir pour imposer le silence. Personne n’est autorisé à quitter la ferme sans autorisation, ni même à recevoir des amis sur place. Les hommes de main du patron contrôlent tous les employés, certains sont même parfois fouettés comme au temps des esclaves. Le travail est dur et nécessite une grande résistance physique, surtout sous le soleil et la chaleur du Brésil. 

Travailleurs dans une fazenda de café brésilienne.

Dans les fermes éloignées du centre du village et du chemin de fer, c’est encore pire. Les employés doivent faire leurs courses au sein même de la ferme, où les produits sont plus chers et souvent avariés. Le tout pour un salaire de misère qui permet à peine de nourrir la famille, et absolument pas d’épargner pour s’enrichir un peu. Ce qui était pourtant le but premier de tous ces pauvres gens. Bien sûr, il existe des patrons bienveillants et des fermes basées dans des zones plus productives. Dans ces conditions il est alors possible d’économiser assez pour se payer un petit lopin de terre à exploiter mais ce n’est malheureusement pas le cas le plus répandu.

De plus en plus, les journaux italiens, ou italiens au Brésil, relaient le désespoir des migrants qui regrettent d’avoir quitté leur pays, mais qui n’ont pas de quoi s’offrir le voyage du retour. 

En octobre 1890, le journal italien « Il Resto del Carlino » publie : « Nous continuons à recevoir du Brésil des communications officielles des consuls et des lettres privées d’immigrants qui acceptent de révéler l’état de misère dans lequel se trouvent nos compatriotes[…] De nombreux ouvriers de nos provinces qui s’y trouvent sont dans la misère la plus crasse, et écrivent à leurs proches pour leur demander de leur envoyer l’argent nécessaire pour se rapatrier. »

En janvier 1891, un immigré, Luigi Franceschi, implore l’aide du prêtre de sa paroisse d’origine : « Je m’adresse donc à sa seigneurie et, par charité, je vous supplie pour les viscères de Jésus et de Marie de favoriser moi et ma pauvre famille non seulement pour le corps mais avant tout pour l’âme parce que nous sommes loin de l’Église, des prêtres et du médecin. Même si nous voulions nous confesser, nous avons besoin de 30 lires, pour baptiser 15 lires, pour une seule consultation chez le médecin 62,50 lires. […] Je crois que votre dignité fera une telle faveur pour que je puisse revenir, m’accueillant comme le père l’a fait avec le fils prodigue. Je termine en le saluant et je vous supplie pour la charité de ne pas m’abandonner et de pouvoir me sortir prématurément d’ici car ma femme et mes enfants pleurent l’abandon de nos plages, d’ailleurs s’il y a des familles de Vedrana qui sont prêtes à venir au Brésil, restez à la maison et vous ne le regretterez pas.« 

En février 1894, le journal italo-brésilien « Il Lavoro », relate les déboires de travailleurs italiens avec leur fazendeiro :

Il Lavoro – 22/02/1894 – Hemeroteca Digital Brasileira

« Ici aussi on se plaint des inconvénients et là aussi on souhaite que certains fazendeiros soient contraints de traiter plus humainement leurs colons. […] Dans la ferme de M. Gustavo Marziel, on a refusé de payer les colons ou du moins de leur fournir de la nourriture pour pouvoir se nourrir. Il a répondu à leurs plaintes avec un fouet, laissant certains d’entre eux blessés. Tous ces pauvres gens qui travaillent sur cette ferme depuis un an sont endettés, et cela principalement à cause du prix excessif des produits que le fazendeiro administrait aux colons, obligeant à payer le double du prix du marché. »

En ce qui concerne les Freschi et les Baldasso, nous ne savons pas quelles fermes les ont employé, ni dans quelles conditions ils ont vécu. Mais il semble clair que la vie n’est pas rose, puisque Vittorio et Amalia ne resteront que deux ans environ au Brésil, avant de repartir pour l’Italie. Ont-ils réussi à économiser suffisamment pour se payer leur billet de retour, ou ont-ils pu compter sur la générosité de la famille d’Amalia ? Dans les deux cas, ce sont 3 billets qu’il faut payer. Pourtant, l’enfant qui les accompagnait à l’aller ne sera pas le même au retour.

En novembre 1894, alors que la famille est installée à Jacutinga depuis quelques semaines et qu’Amalia est enceinte de son deuxième enfant, la petite Maria décède. Agée de seulement 15 mois, elle est depuis enterrée dans le cimetière de Jacutinga.

Acte de sépulture de Maria Freschi – Erreur sur le nom de Vittorio nommé sur l’acte « José Bianchi » – Eglise de S. Antonio – Jacutinga – 1894 – Familysearch – Brasil, Minas Gerais, Registros da Igreja Católica, 1706-1999

Et seulement 3 mois après avoir enterré leur petite fille, en février 1895, le couple accueille un garçon, qu’ils prénomment Giuseppe. 

Acte de baptême de Giuseppe Freschi – L’enfant est prénommé José Luis en portugais. Eglise de S. Antonio – Jacutinga – 1895 – Familysearch – Brasil, Minas Gerais, Registros da Igreja Católica, 1706-1999

On ne sait pas quand les Freschi ont décidé de rentrer au pays. Mais ce qui est sûr, c’est que cette décision n’a pas du être facile à prendre. Renoncer si vite après tant de préparatifs, et sûrement d’argent dépensé, même en sachant qu’ils avaient été trompés sur ce qui les attendait. Laisser derrière eux la tombe de leur petite Maria. Connaitre à l’avance les conditions éprouvantes dans lesquelles se ferait le voyage du retour. Savoir que leur vie dans leur pays sera difficile. Mais s’ils ont fait ce choix c’est que finalement, la vie au Brésil était encore pire qu’en Italie, ce qui en dit long sur les épreuves qu’ils ont du traverser durant ces deux années.

Contrairement à son frère, Carolina ne quittera jamais le Brésil. Elle y fera sa vie avec son mari, ils y auront plusieurs enfants, et elle y décèdera.

On ne connait pas la date exacte du retour de Vittorio et Amalia en Italie. Mais en février 1897, ils sont à Nervesa/Bavaria, où Amalia met au monde son troisième enfant qui sera suivi de quatre autres entre 1899 et 1909.

Extrait de l’acte de naissance du 3e enfant d’Amalia et Vittorio – 1897 – Nervesa – Italia, Treviso, Stato Civile (Tribunale), 1871-1941

Vittorio et Amalia vivront à Bavaria jusqu’à la fin de leur vie, et se nourriront tant bien que mal des terres qu’ils cultivent. Ils ne tenteront plus de quitter leur pays, même lorsque la guerre ravagera leur village. Vittorio décède en mars 1933, un jour seulement avant de fêter ses 60 ans. Amalia lui survivra pendant 8 ans avant de s’éteindre en octobre 1941, à 69 ans.

7 réponses à « L’épopée brésilienne de Vittorio Freschi et Amalia Callegari »

  1. Avatar de Briqueloup

    Quel courage il a fallu à ces familles pour leur pays et s’installer si loin ! Voilà une aventure bien documentée.

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    1. Avatar de Marina
      Marina

      Merci à nouveau 🙂

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  2. Avatar de laparentele

    Superbe article ! Que c’est difficile de survivre…

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    1. Avatar de Marina
      Marina

      On ne se rend pas toujours compte à quel point la vie de nos aïeux a été dure. Ça remet la notre en perspective parfois !
      Merci beaucoup pour votre commentaire 😊

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  3. Avatar de Le rêve américain de Giuseppe et Giovanni Freschi – Voyages dans le temps

    […] mauvaise expérience de Vittorio et Amalia avec le Brésil n’a pas dissuadé certains de leurs enfants de chercher eux aussi une vie […]

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  4. Avatar de Nayara Lemes

    Notre épopée est celle de tous les jours 😊

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  5. Avatar de La dure vie italienne de Luigi Amadio et Carlotta Bettiol – Voyages dans le temps

    […] épousera en 1930 Massimo Freschi, le fils de Vittorio et Amalia. Elle le rejoindra ensuite en France où il avait commencé à travailler quelques années plus […]

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